Impact de la variabilité climatique et de l'anthropisation sur les écoulements de la Bénoué (nord Cameroun)
La sécheresse observée en Afrique tropicale vers la
fin des années 1960, a également affecté le bassin de la
Bénoué en Afrique centrale, avec une persistance remarquable qui
s'est répercutée sur les écoulements. Les ruptures à la
baisse ont été mises en évidence dans les séries
hydropluviométriques de ce bassin au pas de temps annuel en 1970–1971
(pluies) et 1971–1972 (débits). Les déficits associés à cette
rupture sont de % pour les pluies et % pour les débits,
par rapport à la moyenne climatologique (1950–1951 à 2014–2015). La
saison humide a connu des évolutions pratiquement identiques. Cependant,
depuis la décennie 1990, il est observé un relèvement
significatif dans les écoulements moyens annuels de ce cours d'eau, et
cela coïncide avec le retour des pluies. Le maintien de cette hausse au
cours des récentes décennies pourrait être envisagé en
raison de l'accroissement des espaces imperméabilisés dans le
bassin, qui compenseraient le déficit engendré par la rechute des
pluies après la décennie 1990 via une accentuation du
ruissèlement. De plus, depuis la mise en eau du barrage de Lagdo en
1983, il est observé non seulement une augmentation de l'ensemble des
gammes de débits minima suivant des taux allant de % (minimum
sur 1 jour) à % (minimum sur 90 jours), mais aussi un
accroissement général de la variabilité de l'ensemble des
débits extrêmes (minima et maxima). L'augmentation progressive du
stockage en saison de pluies à la retenue de Lagdo, pour fournir
l'électricité et l'eau d'irrigation durant la saison sèche à
une population grandissante, rendent imperceptibles les effets de
l'accroissement des espaces imperméabilisés non seulement sur les
écoulements de la saison humide, mais aussi sur les écoulements
maxima. Au demeurant, l'opérationnalisation du barrage de Lagdo a eu un
impact significatif sur le régime de la Bénoué, se traduisant
essentiellement par le caractère désormais permanent de
l'écoulement tout au long de l'année hydrologique et un important
fléchissement de la crue d'août à octobre.
Abstract. A tendency to drought conditions appeared in tropical Africa from
the end of 1960s, also affect the Benoue watershed in central Africa, with a
remarkable persistence in streamflow. Negative breakpoints are found in the
annual hydroclimatic time series of the Benoue catchment at annual time step
in 1970–1971 for rainfall, and in 1971–1972 for discharges. Compared to the
climatological mean (1950–1951 to 2014–2015), the deficits associated with these
negative breakpoints are approximating −2.9 % for rainfall, and −14.2 % for discharges. The wet season shows similar developments. However,
from the 1990s, there has been a significant increase in the mean annual
discharges of the Benoue River, which coincides with that of the rainfall
during the same decade. The maintenance of this increase over the recent
decades could also be expected in response to an increase in impervious
surface areas (ISA) in the catchment area, which could compensate the
deficit generated by the post-1990s rainfall deficit through increasing in
runoff. From the watering of the Lagdo dam in 1983, an increase in all
ranges of minimum flow, ranging from +57.8 % (1 d minimum) to +70.1 % (90 d minimum), as well as an increase in the variability of extreme
flows (minima and maxima), has been detected. During the wet season, the
increase in water storage capacity at the Lagdo reservoir, which is used to
provide electricity and irrigation water to a growing population, mitigates
the increase in runoff, especially in maximum runoff. Moreover, the
operationalization of the Lagdo dam has a significant impact on the Benoue
hydrological regime, resulting mainly in a new perennial nature of the flow,
and a significant decrease in flood from August to October.